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‘‘ Anticiper les flux d’informations qui resteront en dehors du WMS ou du TMS ’’
Aymeric Le Page, Docloop


Aymeric Le Page, Co-founder & CEO chez Docloop

Aymeric Le Page, Co-founder & CEO chez Docloop


Entretien réalisé le mercredi 2 juillet 2025 par Frédéric LEGRAS, Directeur du Portail FAQ Logistique dans le cadre du dossier : « WMS/TMS : quelle solution pour quels enjeux métier ? ».


Comment la solution Docloop s’articule-t-elle avec les WMS et TMS ?

Si les entreprises sont désormais largement équipées de solutions logistiques et transport pour structurer leurs opérations, une part non négligeable des flux — souvent les plus complexes — continue d’être traitée manuellement. Ces 20 % restants, bien qu’ils ne représentent qu’une fraction du chiffre d’affaires, concentrent une charge disproportionnée : e-mails, ressaisies, paperasse…

C’est précisément dans ces interstices que se niche la valeur ajoutée de Docloop. Là où l’intégration entre systèmes est incomplète — en interne ou avec les partenaires — la solution prend le relais pour automatiser la transformation de documents non structurés en données exploitables.

Concrètement, Docloop repose sur une technologie d’Intelligent Document Processing (IDP). Celle-ci permet d’automatiser la lecture, l’extraction, la validation et l’intégration d’informations à partir de tout type de documents, structurés ou non : factures, bons de livraison, CMR, bordereaux, e-mails…

Docloop ne remplace donc pas les outils logistiques et transports existants mais les complète. L’objectif est clair : éliminer les tâches manuelles à faible valeur ajoutée, fiabiliser les données et fluidifier les processus.




Quelles précautions prendre pour anticiper la gestion documentaire dans un projet WMS ou TMS ?

Choisir un WMS ou un TMS ne doit pas se limiter à comparer des fonctionnalités. Il faut aussi anticiper les flux d’informations qui restent en dehors du système : ordres de transport reçus par e-mail, documents douaniers au format PDF, demandes de devis, etc.

Pour éviter de multiplier les ressaisies, deux questions clés doivent être posées dès le cadrage :

  1. La solution sélectionnée propose-t-elle une brique d’IDP ou peut-elle s’interfacer facilement avec une solution comme Docloop ?
  2. Souhaite-t-on une approche éclatée (une solution documentaire par outil) ou transverse (une plateforme unique pour l’ensemble des métiers) ?

Docloop s’adapte aux deux cas de figure. Elle peut être intégrée en tant que module complémentaire dans un logiciel métier, ou déployée comme plateforme documentaire transverse, connectée à l’ensemble des systèmes applicatifs (TMS, WMS, ERP, douane, GED…).

Une IDP intégrée à chaque outil peut sembler logique, mais multiplie les interfaces, les contrats, les formations et les coûts de maintenance. À l’inverse, une plateforme unique comme Docloop simplifie l’architecture, centralise les traitements et fiabilise les flux à l’échelle de toute l’entreprise.

C’est le choix opéré par AGL (ex-Bolloré Logistics Africa) dans sa transformation digitale : Docloop est interfacée avec ses outils douane, transport, maritime, routier, sa GED et son ERP, pour unifier les processus documentaires et supprimer durablement la saisie manuelle.



Quel poids représentent encore les flux documentaires dans la supply chain ?

La documentation reste un goulet d’étranglement majeur dans les chaînes logistiques mondiales.

Lors de l’expédition d’un conteneur entre la Chine et la France, on estime qu’environ 30 acteurs échangent une cinquantaine de documents. À l’échelle globale, cela représente plus de 1 000 milliards de documents échangés chaque année, selon l’ONU et McKinsey. Pourtant, moins de 1 % de ces flux sont intégralement digitalisés de bout en bout. Faute d’interopérabilité, 90 % des documents sont réimprimés au moins une fois.

Côté opérationnel, les chiffres sont tout aussi parlants : les collaborateurs en charge de la documentation — commandes, douane, conformité… — passent en moyenne 40 % de leur temps à ressaisir des données. Ce manque d’automatisation représente près de 900 millions d’heures perdues chaque année.

En automatisant ces tâches répétitives, Docloop permet jusqu’à 80 % de productivité et 86 % de réduction d’erreurs, selon nos clients. En moyenne, ils économisent une journée par personne et par semaine, un temps précieux réalloué à des missions à plus forte valeur ajoutée.



Allez-vous au-delà de l’intégration avec les solutions TMS et WMS ?

Absolument. Si Docloop est souvent sollicitée en premier lieu pour des problématiques liées au transport et logistique, son périmètre d’intervention dépasse largement ce cadre. En effet, la solution s’étend régulièrement vers les fonctions support : finance, RH, juridique, assurance, etc.

Prenons l’exemple de la gestion des formulaires RH : pour nous, le défi est le même que dans le transport. Il s’agit de capter, structurer et injecter des données issues de documents non standardisés. Formulaires, justificatifs répétitifs… notre technologie s’adapte à ces formats variés pour automatiser leur traitement.



Comment structurer au mieux le déploiement d’une solution comme Docloop dans un environnement WMS / TMS ?

Dans un projet WMS ou TMS, l’intégration d’une brique IDP ne doit pas être perçue comme un chantier supplémentaire, mais comme un levier d’efficacité à chaque étape.

Plutôt que d’attendre que tout soit en place pour lancer un traitement transverse, nous recommandons souvent un déploiement itératif. L’idée ? Commencer sur un cas d’usage simple, mais à fort volume — saisie manuelle d’ordres de transport, intégration de bons de livraison en PDF dans le WMS, traitement de factures dans l’ERP… — pour obtenir des résultats rapides.

Ce type de projet permet de générer rapidement des résultats concrets, faciles à valoriser en interne. C’est souvent dans ces premiers succès que se construit l’adhésion nécessaire pour un déploiement plus large.



Quels bénéfices au-delà de la productivité ?

Contrairement aux solutions ultra-spécialisées sur un seul domaine (ex : douane) ou aux plateformes IA génériques peu contextualisées, Docloop apporte une approche pragmatique : des cas d’usage déjà packagés, enrichis par notre expérience terrain, tout en offrant une extensibilité métier complète.

Docloop ne se limite pas à supprimer les saisies manuelles. La solution permet également de débloquer des situations opérationnelles et créer de nouvelles opportunités business.

Prenons l’exemple d’AGL. Certaines de leurs déclarations douanières atteignaient jusqu’à 600 pages, notamment dans le cadre de flux grande distribution avec de nombreux groupages. Le traitement manuel de ces documents nécessitait jusqu’à trois semaines de travail. Résultat : AGL pouvait renoncer à certains appels d’offres, jugés trop lourds.

Depuis la mise en place de Docloop, ces dossiers sont traités en 15 minutes. Cela représente un véritable levier d’accès à de nouveaux marchés. Des clients autrefois considérés comme trop complexes sont désormais intégrables dans le portefeuille commercial.



Qui utilise Docloop aujourd’hui ?

Docloop compte aujourd’hui une quinzaine de clients en France, en Suisse, au Royaume-Uni et en Afrique. La solution est déjà déployée dans 50 pays africains.

Notre spectre d’intervention est large. Si elle a d’abord été pensée pour les acteurs du transport et de la logistique, la solution s’adresse désormais à tous ceux qui gèrent d’importants volumes de documents non structurés.

Nous accompagnons :

  • Les spécialistes de la douane, comme JDI (Jaubert Douane International) ou C4 Logistics, présents en France et au Royaume-Uni, notamment sur des problématiques post-Brexit.
  • Les transporteurs routiers, avec des clients comme les Transports Granger (membres des réseaux Pall-Ex et Tred Union) ou Asavinter, Chatel, Henriot, de Rijke.
  • Les transitaires, comme Transcausse, AGL
  • Les compagnies maritimes, dans le cadre de la montée en puissance de la digitalisation du fret maritime.
  • Les négociants et chargeurs, y compris sur des sujets transverses : RH, conformité, finance…

Chez ces derniers, les cas d’usage sont multiples. Un grand acteur du retail, par exemple, utilise encore des systèmes AS400 dont les seuls exports sont… des PDF. Résultat : des centaines de lignes à ressaisir à la main pour chaque commande. Un autre industriel nous a récemment évoqué la lourdeur de la gestion des arrêts maladie, reposant sur des documents semi-structurés et des processus manuels fastidieux.

Même les entreprises les plus avancées sur l’IA restent confrontées à ces zones grises. Et c’est justement là que Docloop trouve toute sa pertinence.

Mais pour répondre à ces cas d’usage complexes et variés, encore faut-il disposer d’une approche technologique souple, capable de s’adapter sans tout réinventer à chaque besoin. C’est précisément ce que permet notre studio IA.



Pourquoi avoir fait le choix de développer votre propre studio IA ?

L’essor de ChatGPT a poussé de nombreuses équipes IT à tester l’extraction documentaire via des grands modèles de langage. Sur un cas d’usage simple, en démonstration, les résultats sont souvent impressionnants. Mais dès qu’il s’agit d’industrialiser, les limites apparaissent : erreurs sur les documents longs, instabilité des modèles, manque d’outillage MLOps, absence de gouvernance…
Les DSI se retrouvent alors à devoir répondre à des besoins multiples sans avoir les ressources pour maintenir plusieurs flux IA en production.

C’est pour cela que Docloop a développé un studio IA propriétaire, conçu pour orchestrer différents modèles (internes ou externes) selon le type de document et le besoin métier. Ce studio nous permet de sélectionner le bon moteur pour chaque cas d’usage (ChatGPT, Azure, Anthropic ou modèles internes), de traiter des documents volumineux et de produire des données directement exploitables. Il sera prochainement accessible via une interface no code / low code, offrant aux DSI la possibilité de créer leurs propres cas d’usage, d’adapter les règles de gestion à leurs processus et de connecter leur SI sans avoir à gérer l’infrastructure IA sous-jacente.

Ils pourront ainsi :

  • Concevoir ou adapter leurs cas d’usage à partir de notre bibliothèque de modèles pré-entraînés,
  • Personnaliser les règles de gestion en fonction de leurs processus,
  • Et connecter leur propre système d’information sans avoir à se soucier de l’infrastructure IA sous-jacente.

Cette ouverture marque un tournant. Elle permettra aux DSI de reprendre la main sur leurs projets IA documentaires, tout en s’appuyant sur une base robuste, pensée pour l’industrialisation. Dans des environnements complexes et fragmentés — où cohabitent TMS, WMS, ERP, GED, outils métiers… — le studio facilitera l’orchestration des cas d’usage, la mutualisation des efforts, et l’accélération des déploiements.

Fini les développements spécifiques à chaque besoin : une seule plateforme permettra de piloter l’ensemble de la stratégie IA documentaire.


A propos de Docloop

Docloop est née d’un projet initié par MGI (leader de la gestion de flux de données portuaires), à la suite de 200 interviews menées dans l’écosystème du transport et de la logistique. Parmi 38 projets d’amélioration identifiés, Docloop a été classée prioritaire, ce qui a abouti à sa création en 2022 et le démarrage de sa commercialisation fin 2023.

La solution bénéficie du soutien de l’ADEME, qui la finance à hauteur de 3 millions d’euros dans le cadre de ses travaux en faveur de la décarbonation de l’industrie et de la frugalité numérique.

Au-delà de ses performances technologiques, Docloop accorde également une attention particulière aux enjeux de souveraineté numérique et de sécurité des données. L’ensemble de son infrastructure repose sur des technologies 100 % européennes et sécurisées. Cette approche est essentielle dans un contexte où les documents traités sont souvent critiques (douane, finance, RH…), et où la confidentialité constitue un impératif.

Bio Express

Diplômé de SKEMA Business School, Aymeric Le Page a occupé des postes clés en stratégie, transformation, et direction générale chez Accenture, Nestlé, et Per Angusta (achetée par SpendHQ en 2022) en France et aux Etats-Unis avant de co-fonder Docloop. Avec une solide expertise internationale, il ambitionne de révolutionner l’interopérabilité et la gestion documentaire dans la logistique à l’aide de l’intelligence artificielle.

Site Internet : https://www.docloop.io/
Page LinkedIn : https://www.linkedin.com/company/docloop/


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