Actualité >

Au début, il y avait la GPA



Aslog


03/06/2010

En suivant la demande, sans nécessairement parvenir à l'optimisation logistique (camion complet…), la GPA responsabilise le fournisseur (l'industriel) vis-à-vis de son client (le distributeur).

La GMA quant à elle, permet de réduire les coûts de transport, de transformation, de picking… en mettant ensemble un plus grand nombre d'acteurs (fournisseurs, distributeurs) sous l'arbitrage d'un 4PL : ils placent dans le même camion de plus en plus de produits nécessaires et de moins en moins de produits d'anticipation. Correctement animée, la GMA devient une source d'amélioration des relations du fournisseur et du distributeur. Si ce n'est du win-win, ça y ressemble ! Voilà ce qui ressort de l'interview de Bruno Bourgeon, considéré aujourd'hui comme le père de la GPA en France.

Selon GS1 France, la GPA (Gestion Partagée des Approvisionnements) est « un processus de collaboration logistique entre un industriel et un distributeur où l'activité de réapprovisionnement est partagée entre les deux partenaires et tirée par la demande. À partir des mouvements de stocks entrepôt (GPA entrepôt) ou des sorties de caisse (GPA point de vente) transmis par le distributeur, l'industriel prend en charge les approvisionnements de son client par le calcul et l'envoi d'une proposition de commande ». La technique est également désignée par le sigle VMI (Vendor Managed Inventory, pilotage des niveaux de stock par les consommations). Attention ! Contrairement à ce qui se passe en GPA, en VMI, après le calcul du besoin par le fournisseur, il n'y a pas de retour de confirmation de la commande : la proposition de commande émise par l'industriel devient automatiquement la commande du client, alors qu'en GPA, le client doit d'abord approuver la proposition de commande que lui adresse son fournisseur (le P de GPA signifie effectivement "partagée"). Quoi qu'il en soit, dans les deux cas, VMI et GPA, les informations relatives aux sorties de stock et aux niveaux de stock du distributeur sont transmises à l'industriel : elles alimentent son logiciel d'optimisation de réapprovisionnement du stock du distributeur. Le VMI s'inscrit dans une démarche confiante du distributeur qui, en échange de la mise à disposition des informations relatives à ses ventes et à ses stocks, se soustrait aux servitudes de l'approvisionnement et bénéficie d'un taux de service accru, tandis que le fournisseur tire parti d'une réduction significative de l'incertitude relative à la prévision de la demande finale et du même coup d'une diminution de son stock de sécurité. À l'inverse, la confiance n'est pas nécessairement au rendez-vous en GPA, puisque le fournisseur doit attendre l'aval du client pour déclencher la livraison qu'il a proposée.

Il est toutefois un fait qu'en GPA, la quasi-totalité (plus de 95 %) des propositions de commande est validée en l'état, de sorte que très souvent, VMI et GPA, c'est "bonnet blanc et blanc bonnet". Certes, il est en France des distributeurs qui ne font pas totalement confiance en leurs fournisseurs… Tandis que certains fournisseurs auraient tendance, dit-on, à "gonfler" leurs propositions… Ce qui ne crée pas, bien entendu, les conditions favorables à une relation de confiance. Il faut par conséquent abattre le mur de défiance entre le distributeur et le fournisseur ! Le désarmement logistique s'impose.




De la GPA à la GPA

« La GPA est née de la nécessité de ne plus faire de stock spéculatif… », affirme Bruno Bourgeon, considéré en France comme le père de la Gestion Partagée des Approvisionnements à l'époque où il travaillait chez Mars Unisabi (aujourd'hui, il est chez Diagma), «… et de travailler en flux pour satisfaire la demande. Récupérons cette demande, réapprovisionnons ce qui a été consommé. C'est un outil intelligent de réapprovisionnement ».

La GPA concerne en premier lieu les produits stockables appartenant au secteur alimentaire, et les produits de DPH (Droguerie, Parfumerie, Hygiène) dont la typologie de flux est proche de celle des produits alimentaires. Comme, au travers de la GPA, il s'agit de suivre la demande, on peut aussi la mettre en oeuvre avec d'autres processus d'approvisionnement, en se fiant aux sorties des magasins pour effectuer le calcul de besoin brut et réapprovisionner juste la quantité consommée (sans nécessairement entreprendre de calcul d'optimisation).

A contrario, les produits techniques non alimentaires (électronique grand public, textile…) ressortent essentiellement du monde du grand import, impliquant des délais longs (40 à 60 jours entre le point de départ et le point d'arrivée), ce qui rend difficile, voire impossible, la mise en oeuvre d'une GPA. En outre, le très fort renouvellement des gammes, notamment dans le secteur de l'électronique grand public, n'est pas compatible avec une GPA qui s'accommode beaucoup mieux de flux réguliers de produits de fond de rayon.

L'objectif de la GPA est de réduire les stocks et donc l'investissement, réduire les temps de traitement et augmenter le taux de service aux clients finals, en s'appuyant sur l'expertise du fournisseur : ce dernier propose des livraisons en camion complet au distributeur qui les accepte. Pour réduire encore les stocks, il faudrait livrer plus souvent en plus petites quantités, quitte à mutualiser les camions entre plusieurs fournisseurs résidant dans une même région : tel est le concept de la GPA multipick qui consiste à mutualiser les transports de marchandises de chaque fournisseur par l'enlèvement successif sur leurs sites. Mais sa gestion est compliquée, car elle implique une bonne entente quant au contenu du camion mutualisé et aux horaires de tournées… Ce qui conduit petit à petit vers la GMA (Gestion Mutualisée des Approvisionnements).


Suivre les sorties et ne réapprovisionner que ce qui est sorti

Au départ, il y avait une étude théorique lancée par Promodès, ancien groupe français de grande distribution (sa fusion avec Carrefour date de 1999) et Unisabi (groupe Mars) visant la recherche de pôles d'améliorations.

Cette étude fut présentée lors du congrès du CIES de Vienne en 1988 : le CIES ou Comité International d'Entreprises à Succursales, est devenu le Consumer Goods Forum en juin 2009 après sa fusion avec le Global Commerce Initiative et le Global CEO Forum. L'étude s'intéressait déjà à l'EDI, à la gestion des promotions, au Category Management, aux approvisionnements. « À l'issue de cette conférence, il nous a été demandé de développer un nouveau concept d'approvisionnement », se remémore Bruno Bourgeon représentant Unisabi (Masterfoods), qui a travaillé avec Maël Barraud, à l'époque directeur chez Continent Hypermarché avant de créer la société Influe en octobre 1990.

« Nous avons inventé le processus de réapprovisionnement automatique à partir d'informations sur les sorties de stock et le niveau de stock », poursuit Bruno Bourgeon qui a commencé par approvisionner l'entrepôt de Logidis à Aubergenville, près de Chambourcy… avec un Minitel et un tableur.

« C'est dans ce contexte qu'Unisabi a confié à la société CTS, Centre Télématique Services, le développement informatique du premier logiciel spécifique de gestion partagée des approvisionnements : OCS (Optimisation des Commandes et des Stocks, Order Control System) ».

Tôt le matin, tous les jours, l'entrepôt de Promodès communiquait ses sorties de stock et le niveau de son stock à Unisabi par un message INVRPT donnant l'état d'inventaire. Unisabi pouvait dès lors émettre ses propositions de commandes d'approvisionnement.

« Nous utilisions le code-produit de Promodès qu'il fallait traduire en code interne. Pour que le processus fonctionne correctement, il fallait que les fiches produit soient parfaites », insiste Bruno Bourgeon : « un important travail a été réalisé pour mettre d'aplomb le code-produit, afin de disposer d'un langage d'échange avec le distributeur… Ce qui nous a valu le premier trophée Gencod ».

Une base de données relationnelle a été bâtie dans laquelle on retrouvait la définition de chaque produit en code EAN 13… Elle renfermait en l'occurrence un millier de références Unisabi.

« En 1991, le stock de cet entrepôt d'Aubergenville a été transféré vers Lieusaint dans un entrepôt devenu le pilote officiel de Promodès ».

Par la suite, jusqu'à 65 % en volume des livraisons de Mars étaient gérées en GPA pour Carrefour, Auchan, E. Leclerc, Provera (centrale d'achat des enseignes Match et Cora). Les bénéfices ont été conséquents puisqu'il a été possible de réduire de 25 % le volume des stocks.


De Mars à Diagma

Pour sa part, Bruno Bourgeon a été à partir de mars 2001 directeur général de la société Groupéco qui assurait les prestations de transport à la demande de Mars sous la responsabilité de Benoît Thiebaud. Leur objectif commun était de développer des services à valeur ajoutée. « La réflexion menée avec Bruno Berton qui m'a remplacé chez Mars concernait la GPA mutualisée du chocolat (snack food) nécessitant des transports à température dirigée », se souvient Bruno Bourgeon : « Bruno Berton a ensuite occupé le poste de directeur Supply Chain chez Cadbury : ne disposant pas du volume suffisant pour la GPA, des projets de mutualisation ont germé à partir de 2002. Les relations entretenues avec Jean-Marc Laperrelle (Douwe Egberts, groupe Sara Lee) ont permis de donner corps au projet de mutualisation qui s'est matérialisé après une réunion des comités de direction des deux groupes ».

En septembre 2003, ILS, filiale d'Influe a été créé par Bruno Bourgeon et Benoît Thiebaud : les premiers tests de GMA ont été menés en septembre 2004. « Nous réalisions le transport mutualisé du café et du chocolat sous température dirigée vers un entrepôt d'Auchan (Blanquefort) et deux entrepôts de Carrefour ». Le café qui était transporté jusqu'alors en camions bâchés, a été rangé avec le chocolat dans le même camion fonctionnant en température dirigée. Le transport s'effectuait dans des camions complets. Le bilan de cette opération pilote a démontré que le coût du transport n'avait pas augmenté. Le déploiement qui a suivi concernait 38 entrepôts de 7 enseignes de la grande distribution (Carrefour, Auchan, Système U Ouest et Sud, Match, Cora, Le Galec SCAP nord, Casino à Saint-Laurent-de-Mure). Ils allaient être approvisionnés par plusieurs groupements de fournisseurs dont celui de Cadbury et Sara Lee regroupés chez FM Logistic à Neuville aux Bois.


Un second principe fondé sur la prévision à court terme

En GPA, le besoin brut correspond à la quantité à réapprovisionner, en l'occurrence ce que le fournisseur a vu sortir de l'entrepôt du distributeur. Mais ce besoin brut ne correspond pas nécessairement à la quantité sur laquelle le distributeur et le fournisseur se sont mis d'accord : le camion complet, ou une tranche tarifaire s'il s'agit d'un demi-camion… Comment remplir la partie manquante de la surface réservée du camion ?

« En complétant la livraison par le calcul des besoins futurs », répond Bruno Bourgeon : « le besoin brut correspond à ce qui va être livré demain à partir de la constatation d'hier… Par contre, l'optimisation du véhicule correspond à la livraison de demain et d'après-demain à partir de la constatation d'avant-hier. On réalise donc là une prévision sur un horizon très court pour remplir le camion avec un faible risque d'erreur ».

Notons immédiatement qu'en GMA (Gestion Mutualisée des Approvisionnements), la quantité correspondant à cette optimisation est réduite, car le camion est rempli par les marchandises de plusieurs fournisseurs… Dès lors, les risques d'erreur sont minimisés.

Le fait de livrer des produits en respect de prévisions de la demande implique naturellement qu'on a affaire à des produits stockables, puisqu'on ajoute à des besoins bruts, des produits qui ne sont pas nécessaires le lendemain matin.

Plusieurs situations sont susceptibles de se présenter si la somme du besoin brut et du besoin estimé dépasse la capacité du camion de livraison (33 palettes) :

  • Le dépassement est suffisamment faible pour pouvoir réduire le besoin estimé, éliminer un nombre réduit de palettes en vérifiant toutefois que les palettes éliminées ne correspondent pas à des produits pour lesquels un danger de rupture en linéaires existe, ce qui est tout de même rare.
  • Mais si le danger de rupture est bel et bien réel, il conviendrait alors de préparer un second camion que l'on remplirait à partir de quantités issues de nouvelles prévisions.
  • En sortant du cadre fixé par les CGV (Conditions Générales de Vente) imposant des livraisons de point à point par camion complet, le fournisseur peut encore et toujours procéder à une livraison exceptionnelle des palettes supplémentaires pour lesquelles un véritable risque de rupture existe.
  • Il peut aussi pratiquer une GPA multidrop, en mettant dans un même camion des palettes de produits destinés à plusieurs (deux, trois…) entrepôts suffisamment proches, appartenant (ou non, pourquoi pas ?) à un même distributeur.

Pour Bruno Bourgeon, « le multidrop peut être plus intéressant qu'une livraison respectant strictement les CGV conduisant à surstocker… Car un surstock n'empêche pas la rupture : plus on a de stock, plus on couvre un horizon lointain, et plus le risque d'erreur de prévisions peut être important… D'où l'intérêt d'accepter une fréquence de livraisons plus grande, quitte à ranger dans le même camion les marchandises de différents fournisseurs au travers d'une GPA multipick ». C'est le principe retenu avec Sara Lee qui était installé dans un entrepôt de Norbert Dentressangle à Artenay, au nord d'Orléans, et avec Cadbury implanté chez Wincanton à Sant-Cyr-en-Val au sud d'Orléans, distant d'une quarantaine de kilomètres du premier… Conduisant au premier dossier de Gestion Mutualisée des Approvisionnements (GMA) pilotée à l'époque par un prestataire neutre, un 4PL (4th-Party Logistics Provider, le pilote des opérations logistiques), en l'occurrence la société ILS, filiale d'Influe, et ce, en s'aidant de son logiciel EWR adapté à la GMA.

« Le fait d'être dans un même entrepôt favorise la mutualisation », ajoute Bruno Bourgeon, « mais il engage fortement les industriels à moyen terme… Un problème est susceptible de se poser lors d'une fusion ou d'une acquisition de l'un ou l'autre de ces industriels. Dès lors, le multipick (chacun dans son entrepôt) garde son attrait ».

L'attrait de la mutualisation persiste dans le cas d'une promotion organisée par l'un des fournisseurs : il suffit que le 4PL organise une navette pour ramener les produits du second fournisseur dans l'entrepôt du premier afin de pouvoir compléter le camion renfermant ses produits en promotion.


De la GPA à la GMA

En GPA concertée, le camion est partagé entre plusieurs fournisseurs, selon des règles fixées a priori. Certes, c'est mieux que rien. Ce processus n'est pas optimisé (car chacun se doit de remplir la partie du camion qui lui est assignée), mais il permet à chacun de garder la confidentialité de ses propres informations logistiques.

La GPA mutualisée, ou GMA (gestion mutualisée des approvisionnements) ou encore pooling est un projet d'entreprises : les fournisseurs participant à ce processus optimisé d'approvisionnement doivent avoir envie de collaborer, et d'accepter de s'échanger des informations logistiques. « La GPA mutualisée est avant tout de la GPA appliquée à un ensemble d'industriels fournisseurs de la grande distribution. Elle conserve toutes les qualités de la GPA », estime Bruno Bourgeon.

Pour réussir en GMA, il est convenu qu'il est préférable de travailler avec des partenaires de taille similaire (cas de Sara Lee et de Cadbury). En doublant la fréquence de réapprovisionnement des entrepôts du client (le distributeur), les stocks diminuent de façon mécanique de 25 % environ.

Mais, ce n'est pas là une condition nécessaire et suffisante : dans le cas de partenaires de taille différent, la problématique est un peu plus compliquée.

La GMA perœ outre d'approvisionner les produits risquant la rupture : la qualité de service des rayons s'en trouve améliorée d'au moins 0,6 point.

Enfin, le bilan Carbone fait état d'une réduction sensible des émissions de gaz à effet de serre.

Jean-Claude Festinger
www.aslog.org


Ressources complémentaires :

 

‘‘FM Logistic a développé une compétence de coordinateur basé sur la gestion mutualisée des approvisionnements des distributeurs''
Parole d'Expert
29 Août 2013

Caroline SELLIER-SULFOUR, Directeur Développement GPA mutualisée de FM Logistic, explique le concept et les objectifs du pooling à travers le cas concret de SPHINX, pool agro-alimentaire de Longueil-Sainte-Marie.


 


FAQ logistique est un média relayant les actualités des secteurs transport, logistique et supply-chain. Les communiqués de presse publiés sur FAQ Logistique ne sont pas rédigés par nos équipes mais directement par les sociétés qui souhaitent les diffuser sur notre site.

FAQ logistique ne peut donc en aucun cas être considéré comme responsable de leurs contenus. Pour toute question relative à un communiqué, nous vous invitons à vous rapprocher directement de la société concernée.



Contactez notre équipe