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Focus extrait du Feuillet Environnement de TL&A, cabinet de conseil et bureau d’études dédié au secteur Transport / Logistique et au Développement durable.

Le Feuillet Environnement de TL&A
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Deux récentes études de l’Ademe montrent l’impact du changement d’affectation des sols dans la production des biocarburants de première génération, réduisant ainsi leur intérêt environnemental.

Au niveau européen, un objectif d’incorporation de 10% d’énergie renouvelable en 2020 a été fixé pour le secteur des transports. Afin d’atteindre cet objectif, de nouvelles motorisations et de nouveaux carburants se développent. Les biocarburants représentent la solution la plus disponible pour atteindre cet objectif.

Un biocarburant est un carburant obtenu après transformation de produits d’origine végétale ou animale. Les biocarburants de 1ère génération permettent la valorisation de l’organe de réserve d’une plante, des graisses animales ou des déchets. Actuellement, ils sont diffusés sous deux formes :

  • Le biodiesel. Issu d’huile de colza, tournesol et soja, il est incorporé au gazole avec un taux maximum de 7% en volume (B7) ou dans un carburant dédié à une flotte captive des collectivités (ex. Bus), et des entreprises (ex. taxis)
  • L’éthanol. Issu de betteraves, de canne à sucre, de blé ou de maïs, il est incorporé à l’essence au taux maximum de 10% en volume (SP 95, SP 98, SP 95 E-10) ou dans un carburant dédié aux véhicules à carburant modulable. En France, il est incorporé soit directement, soit sous forme d’ETBE (éther obtenu par réaction chimique entre le bioéthanol et l’isobutène issu de ressources fossiles).

Le marché français

En 2010, près de 2,8 tonnes de biocarburants ont été consommées sur le marché routier français, représentant 6,7% (en pouvoir énergétique) de la consommation nationale annuelle d’essence et de diesel :

  • 2,12 millions de tonnes pour le biodiesel
  • 710 milliers de tonnes pour l’éthanol.

Les biodiesels diffusés en France sont majoritairement issus de colza. Les approvisionnements des unités de production en colza et en tournesol se font prioritairement au niveau local puis au niveau européen. Cependant, la part d'huile de soja importée est en progression et peut atteindre jusqu’à 25% des approvisionnements en huile. L'utilisation d'huile de palme importée reste toutefois très marginale. La part globale des importations pour la production de biodiesel a fortement augmenté depuis 2007, jusqu’à représenter en 2009 près de la moitié des quantités nécessaires. Sachant que la filière française des oléagineux exporte, pour d’autres usages, il est fort probable que les quantités d’oléagineux produites en France puissent couvrir les besoins des biocarburants.

Concernant l’éthanol, il reste majoritairement incorporé à l’essence après transformation en ETBE (58% en masse en 2009). La part d’éthanol incorporé directement augmente toutefois régulièrement depuis 2006. La quasi-totalité de l’éthanol consommé, qu’il soit incorporé directement ou sous forme d’ETBE, est produite à partir de matières premières agricoles françaises.




Une ACV pas vraiment favorable

En 2009, une analyse de cycle de vie (ACV) des filières biocarburants réalisée pour l’ADEME et les ministères, avait montré la forte sensibilité des bilans de gaz à effet de serre (GES) du développement et de l’utilisation des biocarburants en France. Cette sensibilité avait découlé des hypothèses des changements d’affectations des sols (CAS). L’accroissement de la demande, notamment nord américaine et européenne, incite à l’importation de matière première auprès de pays ayant recours au changement d’affectation des sols. Ainsi, le CAS provoquerait le relâchement du carbone contenu dans le sol en contribuant, par exemple, au recul des forêts tropicales. Selon le programme des Nations unies pour l’environnement (Pnue), la destruction des tourbières tropicales serait responsable de l’émission de près de 3 milliards de tonnes équivalent CO2 par an.

Afin de pouvoir prendre en compte l’avenir des effets des CAS sur des bases plus fiables, l’ADEME avait lancé plusieurs études et travaux complémentaires, notamment une analyse rétrospective des interactions du développement des biocarburants en France avec l’évolution des productions agricoles, des filières et des marchés destinée à identifier les éventuelles CAS engendrés. Plus récemment, une étude publiée par la Commission européenne en janvier 2012, a souligné les effets potentiellement négatifs des biocarburants sur le climat. En se basant sur des critères plus larges, les émissions de certains biocarburants pourraient être supérieures à celle des carburants fossiles (voir le Feuillet n°86).

"Plus des deux tiers des évaluations [collectées lors de l’analyse rétrospective] aboutissent à un bilan total en émission qui ne permet pas de respecter le seuil de réduction des émissions de GES de 35% par rapport à celle du carburant fossile de référence". Instauré par la Commission européenne, ce seuil minimum de réduction a fait l'objet d'une transposition en droit français par le biais du décret n°2011-1468 du 9 novembre 2011. Le calcul de la réduction doit tenir compte de l'ensemble du cycle de production et de consommation du carburant, par rapport à l'usage des carburants fossiles en 2010. Il prend également en considération la préservation des terres riches en biodiversité et des grands stocks naturels de carbone (voir le feuillet n°83).

En outre, les études réalisées pour l’Ademe ont montré que l’impact de la production des biodiesels est supérieur à celui de la production du bioéthanol, tandis que le parc automobile français se compose à 65% de véhicules diesel.


L’avis de l’ADEME

L’ADEME ne remet pas en question l’objectif d’intégration d’énergie renouvelable à hauteur de 10%. Cependant, elle affiche comme premier objectif de réduire de manière drastique les consommations de carburants en France, quelque soit leur composition. La diminution des émissions du secteur des transports passera par l’addition de plusieurs mesures de politique publique qui concerneront à la fois les besoins de mobilité, les modes de mobilité (individuel, collectifs, rail ou route…), les types de motorisation et les types de carburants.

Par ailleurs, un consensus scientifique se dégage sur l’existence d’un lien entre le développement des biocarburants et le changement d’affectation des sols en termes d’émission de GES. L’ADEME encourage la poursuite de travaux d’évaluation en lançant l’idée de la création d’un groupement d’intérêt scientifique (GIS) chargé d’étudier l’impact des changements d’affectation des sols d’une façon plus générale. Ce groupe permettrait d’obtenir des précisions sur les bilans des biocarburants de 1ère génération afin d’atteindre l’objectif européen de 10% d’énergie renouvelable dans les transports.

Afin de réduire les émissions de GES des filières de biocarburant, des marges d’amélioration existent et résident dans l’optimisation des pratiques agricoles, notamment dans les pays en développement.

L’ADEME soutient l’existence de marges d’amélioration pour réduire les émissions de GES des filières biocarburants, notamment dans les pays en développement où l’optimisation des pratiques agricoles joue un rôle important.

Par ailleurs, les efforts des politiques publiques sembleraient s’intensifier pour réduire les risques de concurrence avec les usages alimentaires ou avec les autres usages des sols. Cela permet de faire avancer la recherche sur les biocarburants nouvelles génération. Toutefois, bien que l’amélioration de la durabilité des filières de 1ère génération reste un enjeu, il ne serait pas raisonnable d’attendre de ces filières encore incertaines la fourniture de carburant à l’échelle des besoins actuels.

L’ADEME conclut sur la nécessité de développer des efforts semblables pour les autres filières de carburant, notamment fossiles, en incluant la réalisation de cycle de vie. Cela permettrait de mieux connaître leurs impacts environnementaux et de prendre en considération les évolutions possibles des approvisionnements en carburant vers des sources potentiellement plus émettrices de gaz à effet de serre.

Les avis de l’ADEME : Les Biocarburants de 1ère génération, avril 2012.

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