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Innovation : la supply chain en pole position

INTERVIEW

‘‘La manière de considérer le transport a changé ’’ J. BOUR, DDS Logistics


Jérôme BOUR, Directeur de DDS LogisticsInterview de Jérôme BOUR, Directeur de DDS Logistics.
Réalisée le 16/03/2018 par Frédéric LEGRAS, Directeur du Portail FAQ Logistique dans le cadre du dossier thématique « Innovation : la supply chain en pole position ».


Quelles sont les principales évolutions qui ont impacté la supply chain ces dernières années ?

Je pense qu’on peut parler « d’effet Amazon ».

Aujourd’hui, on constate qu'une grande partie du succès du e-commerçant et de la fidélisation de ses clients repose sur la logistique. Elle n’est donc plus considérée comme un centre de coût, mais plutôt en tant qu’élément de performance et de développement du chiffre d’affaires.

  Autres contributions

Isabelle BADOC | GENERIX GROUP
‘‘ Les plateformes collaboratives sont une véritable révolution pour la supply chain ’’

Antoine REDIER | GEFCO
‘‘ Nous plaçons l’innovation au centre de notre stratégie de développement futur ’’

Didier GRIS et Philippe MARQUES | A-SIS
‘‘ La robotisation marquera certainement la supply chain dans un futur proche ’’

Sébastien SLISKI | ZETES
‘‘La technologie est un facilitateur, pas LA solution ’’

Le niveau de service proposé a radicalement fait évoluer le degré d’exigence des consommateurs. Deux aspects principaux sont concernés : le raccourcissement des délais de livraison et l’expérience client.

Pour la fonction transport, les impacts sont forts : la qualité de la prestation se doit d’être irréprochable et l'acheteur doit pouvoir bénéficier de visibilité sur son bon déroulement.

Tout cela a clairement changé la manière de considérer le transport et l’importance allouée à la supply chain.

En parallèle, dans les lieux de vente physiques les choses évoluent également. Il est par exemple probable que les magasins sans caisses se développent dans un futur proche.

Nous sommes en effet aujourd’hui dans une situation paradoxale. Jusqu’à présent, tous les distributeurs investissaient énormément d'argent à « embêter » leurs visiteurs avec le passage en caisse. Celui-ci constitue pour les consommateurs un moment assez pénible. D’abord il faut payer, ensuite on attend longtemps…tout cela ne participe pas favorablement à l’expérience d'achat.

Il y a donc un vrai enjeu. Pour que les clients continuent à fréquenter les magasins, il sera certainement plus profitable d’utiliser cet argent pour améliorer la qualité de leur parcours consommateur et pour leur faciliter la mise à disposition de la marchandise, par exemple en prenant en charge la livraison de leurs courses.

La vision de la supply chain en B2C a changé et nous pensons que le B2B est en train d’adopter les mêmes niveaux d’exigence. Les acheteurs professionnels souhaitent également profiter d’une expérience client satisfaisante, de livraisons rapides et de visibilité sur la réalisation de leurs commandes.




Comment voyez-vous les prochaines années ?

La robotisation et la digitalisation devraient logiquement continuer à se développer, même si, aujourd'hui, le coût humain constitue encore un frein.

Plus spécifiquement sur la livraison urbaine, sans forcément évoquer la distribution par drone qui ne semble pouvoir être adaptée qu’à des cas bien particuliers, il existe à l'heure actuelle des solutions réalistes aussi bien techniquement qu’économiquement. Je pense en particulier aux livraisons B2C par petits véhicules autonomes.

Ensuite, pour répondre à la contraction toujours plus forte des délais, le big data et l’intelligence artificielle ont certainement beaucoup à apporter. Ils devraient aider à prédire les comportements des consommateurs et à prépositionner les stocks et les moyens en fonction de prévisions hyper fiabilisées. Il est également envisageable que ces technologies permettent d'anticiper assez finement la demande pour rendre possible le lancement de préparations de commandes qui ne seraient pas encore passées par les clients. Là, la tendance devrait aussi bien concerner le B2C que le B2B.

À partir du moment où elles seront suffisamment fiables, l’application de ces technologies contribuera à répondre à ce désir d'immédiateté de manière beaucoup plus efficace.


Sur quels sujets en rapport avec ces évolutions des modes de consommation et des exigences des clients travaillez-vous ?

Nous avons lancé l’année dernière notre programme Join2Ship, en partant du credo que le niveau d’expérience client du B2C allait se propager au B2B.   

Les professionnels ont besoin de retrouver dans la réalisation de l’opération de transport le même niveau de qualité que celui dont ils bénéficient quand ils achètent chez Amazon.

Or, en réalité, il est aujourd'hui très compliqué pour les fournisseurs de proposer un tel niveau de prestation.

C’est donc pour répondre à ce besoin que nous avons créé la plateforme Join2Ship.

Le sujet a été traité sur un mode assez différent de ce que nous faisions jusque-là. Nous sommes en effet partis d'une page blanche avec une approche agile et des cycles de développement beaucoup plus courts que ceux de nos TMS pour lesquels l’approche est plutôt incrémentale.

Join2Ship a été créé dans un process assimilable à ceux utilisés par les start-ups. Ce programme d'innovation était majeur à l’échelle d’un acteur de notre taille.

Dès le début, les clients ont été intégrés au projet. Avant que la plateforme ne soit officiellement lancée, nous avons réuni un groupe de clients que nous avons appelés ambassadeurs dans l'idée de les associer à la conception et au développement de la solution.

En effet, même si nos équipes connaissent très bien le marché, une confrontation rapide aux premiers retours terrain est toujours précieuse. Elle permet de faire progresser plus vite le produit et de s’assurer de ne pas se tromper de direction.


Vous parliez de mode start-up…

Nous avons lancé un incubateur début 2016. L'objectif était de s'appuyer sur un laboratoire d’idées aussi bien internes qu’externes. Il s’agissait de faire émerger des sujets qui ne correspondent pas directement ce que nous faisions jusque-là.

Dans ce cadre, nous avons donc retenu le projet Join2Ship fin 2016. Celui-ci a été porté par une équipe dédiée totalement indépendante de DDS Logistics opérant à son rythme avec une structure beaucoup plus légère.

DDS Logistics a bien entendu apporté ses compétences métier et techniques, mais l’entité a son propre business plan.


En savoir plus sur Join2Ship

Après une démarche de validation menée en partenariat avec des clients ambassadeurs, DDS Logistics a dévoilé officiellement sa solution collaborative Join2ship fin 2017.

Join2ship est un réseau social qui permet aux fournisseurs, clients et transporteurs de planifier, gérer et suivre les expéditions en temps réel ainsi que les réceptions de marchandises. La solution donne notamment aux clients une visibilité sur le transport de leurs commandes fournisseurs : de l'annonce des commandes jusqu'à la prise de rendez-vous.

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Comptez-vous vous appuyer sur la blockchain dans les prochaines années ?

Nous estimons qu'elle a clairement un intérêt pour notre métier. 

La blockchain permet en effet de partager et de faire authentifier une transaction par l’ensemble des acteurs. Dans une logique de relation multi entreprises, l'idée est de déclencher automatiquement des opérations, par exemple à partir de certains seuils. Cela fait beaucoup de sens dans une supply chain.

C'est donc un sujet que nous investiguons en priorité puisqu’il entre clairement dans le cadre des questions d'échanges de biens, d'informations, de certifications, de transactions, de responsabilité juridique, etc.

Néanmoins, il existe encore à mon sens des freins à lever. En particulier en termes de consommation électrique. Si on regarde la blockchain en tant que support technologique du bitcoin, chaque échange doit en effet être validé par les différents ordinateurs du réseau qui sont intervenus plus tôt dans la chaîne de transactions.

L’impact énergétique est très important. La consommation associée à une transaction bitcoin équivaut aujourd’hui à celle d'une maison pendant une semaine !

La technologie ne semble donc pas à ce jour adaptée à un déploiement industriel à grande échelle pour des raisons de coûts de traitement et en particulier d'impact au niveau du développement durable.


Êtes-vous sollicités dans le cadre de projets de digitalisation ?

Nous sommes en effet positionnés sur plusieurs projets pour lesquels le point de départ correspond à une interrogation sur la digitalisation, en particulier sous l’angle de la collaboration. Dans le transport, l’enjeu est central.

Le fait que nous soyons sollicités est assez naturel dans la mesure où la digitalisation du transport constitue notre quotidien depuis 20 ans.

Nous avons donc la chance d’évoluer sur un marché qui bouge fortement. Ces projets permettent de mettre en avant l’intérêt du transport en tant que vitrine de la société.

Nous constatons cependant qu’un certain nombre d’entreprises sont encore dans le flou et se posent les questions suivantes :

  • Avons-nous besoin d'un TMS ou d'une plateforme collaborative ?
  • Quelle sont les différences entre ces deux types de solutions ?
  • La blockchain va-t-elle nous permettre de résoudre tous nos problèmes ?

Pour aller plus loin


Bio Express :

Jérôme BOUR a pris la Direction de DDS Logistics en 2000, leader du TMS. Il a auparavant occupé les postes de Directeur Informatique du Groupe DAHER, de Responsable de l’organisation et des systèmes opérationnels chez DHL et de Consultant chez Ernst & Young.

Site Internet de DDS Logistics : www.ddslogistics.com


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